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LA VOIX DU CITOYEN

Didier Ouédraogo au ministre de la Justice, à propos des libérations provisoires : « The show must go on ! »

10 Juin 2016 , Rédigé par bf1er

Didier Ouédraogo au ministre de la Justice, à propos des libérations provisoires : « The show must go on ! »

Après toute honte bue, toute trahison assumée nous voilà dans les feuilletons à dormir debout, orchestrés par le pouvoir de RMCK. Cette libération provisoire des "indignes" du peuple burkinabè est sans appel sur l’absence de volonté totale de ceux qui, dans notre pays étaient censés être les garants de nos institutions. Les charges sont édifiantes, voire accablantes. On en arrive à penser qu’ils essaient de trainer le peuple dans la boue de l’histoire.

Comment peut-on, devant de telles manipulations, déclarer haut et fort que l’indépendance de la justice s’assume, avec des décisions qui plaisent ou qui ne plaisent pas. M. Bagoro, il ne s’agit pas de faire plaisir au peuple burkinabè. Il a assez souffert dans l’histoire pour savoir que la question de la justice n’est pas une partie de plaisir. Il s’agit ni plus ni moins que de lui rendre justice.

Pas une seule fois, vous n’avez apprécié (puisque vous semblez sortir de votre réserve en prétextant la séparation du pouvoir) cette décision au regard de la loi dans notre pays, au regard des "acquis de deux insurrections populaires", une expression consacrée devenue un fourre-tout, dont tous les guetteurs de nouvelle légitimité se repaissent à coup de discours opportunistes, la vidant ainsi de son contenu historique.

Pas une seule fois vous n’avez eu le courage de mettre le moindre doute sur des certificats que des médecins complaisants de ce pays et ailleurs peuvent distribuer à des "patients", en toute complicité et impunité en violation du serment d’Hippocrate. Votre sortie médiatique aurait dû afficher un objectif minimal : Affirmer la volonté du gouvernement d’œuvrer à ce que l’impunité ne passe plus jamais au Burkina Faso, au regard d’une telle décision dont il y aurait à redire. Pourquoi d’ailleurs affirmer à chaque seconde l’indépendance de la justice et faire cette sortie médiatique qui n’honore ni vous ni le gouvernement dans son ensemble.

Monsieur le Ministre, depuis quand l’indépendance de la justice est-elle une réalité pour tous les justiciables au Burkina Faso ? Il ne s’agit pas d’affirmer et de marteler ce qui, sans aucun doute, constitue l’une des plus fortes exigences de notre peuple - la fin de l’impunité passant par une véritable indépendance de la justice- pour que cela advienne comme par magie. Vous devez être en mesure de comprendre que la méthode Coué ne fonctionne pas forcément dans ce cas de figure, même si cela semble être la marque de fabrique des autorités actuelles qui nous gouvernent : la situation du peuple burkinabè change à force d’en parler… Quelle méthodologie de progrès !

Monsieur le Ministre, notre justice, vous le savez, puisque vous en avez la charge opérationnelle, n’est pas indépendante. Pire, les arrestations tous azimuts qui ont lieu doivent faire l’objet d’instructions judiciaires conséquentes, faute de quoi, l’arbitraire prend le pas sur les principes de droit et de justice. Et comme par enchantement, les différentes arrestations n’ont pas eu réellement pour objectif de rendre justice à un peuple qui a vécu et souffert dans sa chair et dans l’âme toutes les humiliations d’un pouvoir despotique dont certains détenus étaient les idéologues et les thuriféraires zélés. En effet, le scénario que vous servez en mission commandée est d’une simplicité telle que même le citoyen ordinaire en comprend le sens.

Au fur et à mesure de l’écriture de l’histoire nationale du pouvoir du MPP (Mouvement du peuple pour le progrès, parti au pouvoir, ndlr), nous assistons à des reculades de plus en plus importantes dans les promesses, nous célébrons d’innombrables messes inaugurales et de réconciliation nationale et internationale sans justice. Des pactes entre des personnages d’hier et d’aujourd’hui dont les survies sont interdépendantes, sont scellés chaque jour.

Monsieur le Ministre, et tous ceux qui vous envoient en mission commandée plaider une bonne cause avec de fausses raisons, prenez garde au peuple burkinabè, car le principal acquis des insurrections, c’est qu’il ne se laissera pas plus divertir encore moins humilier. Cet enseignement passe au-dessus de tous les montages politico-médiatiques.

Sachez, Monsieur le Ministre, qu’il n’y a pas pire humiliation pour un Homme que de se mentir à lui-même, ou pire encore quand il incarne l’autorité de l’Etat, de mentir à son peuple. Il n’est jamais trop tard pour mériter la dignité de votre fonction.

Mais the show must not go on !

Didier A. Ouédraogo. Paris

SOURCE: lefaso.net

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